Nous sommes tous des assassins
On est trois, Gino le Corse, Dutoit le médecin, moi c’est Le Guen. On a du sang sur les mains et nos journées se passent à l’ombre.
 On est condamnés à la machine à raccourcir.
Janine et Agnès attendent Arnaud, l’avocat. Elles lui posent une question : c’est vrai qu’on les attache la dernière nuit ?
Arnaud attaque la Société : « On est pas capable d’insérer ces gens, d’en faire des citoyens… »
 Il fait encore nuit, c’est le tour de Gino, on lui passe une chemise propre. Moi, Le Guen, je reste en taule. J’ai été condamné pour avoir exécuté des ennemis et des traîtres pendant la guerre. Les donneurs d’ordres sont devenus des héros.
Pour la Résistance, je faisais des commissions, c’était boulot, métro, vélo et je ne savais pas lire. Le capitaine Bayard me donne une mission, la première.
En prison, arrive un nouveau, Bauchet, un meurtrier, le pire de tous.
Pendant l’Occupation, il y a Rachel et Noblet, chacun veut quelque chose de moi.
Les jours d’exécution, le bistrot le Bon Coin ouvre de bonne heure, on se bouscule. Il va y avoir du monde.
 La Société vient chercher Bauchet, c’est le matin de la mort. Il est cinq heures.  Alors Bauchet hurle : ASSASSINS !!!  Alors la prison crie assassins, assassins !!!
Le Guen a mal au ventre, on l’emmène à l’hôpital. C’est le docteur Detouche qui s’occupe de lui. Dutoit va moins bien. La cour de la prison suffira.
   
Pendant la guerre, Le Guen est un exécuteur, les ennemis, les collabos. Après c’est un tueur lié aux lois républicaines, c’est la prison.
Le docteur Guillotin ne sera en retraite qu’en 1977.
La société, elle aussi, a les mains rouges.
 
Patrice Lebrun, revue 813


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